Comment choisir un caractère ?
Chaque caractère d’imprimerie possède son propre passé, véhicule un bagage culturel, historique et social, et crée par sa seule présence sur une page, au-delà du sens des mots écrits, une véritable ambiance. De ce fait, il influe directement sur l’interprétation du texte et implique de la part du maquettiste ou du graphiste une bonne connaissance des caractères.
S’il ne peut être le résultat d’une sélection dictée par des critères scientifiques, le choix d’un caractère ne se limite pas pour autant à son aspect formel et à ce qu’il peut connoter. Il s’agit de le tester en différents corps, de juger de son rythme, de sa couleur. Correspond-t-il à l’esprit de la composition, convient-il au contenu qu’il transmet ? Difficile d’avoir une certitude, mais simplement une impression de justesse qui naîtra d’une observation attentive des caractères.
Travailler le graphisme avec la typographie c’est aussi jouer avec des paramètres comme la taille et la graisse de caractère, la casse, le gris typographique, la justification, l’interlettrage, l’interlignage, les espaces blancs …
Un texte est, c’est une évidence, une succession de lettres groupées en mots. Comment donc la typographie, composant unique, ne pourrait-elle pas avoir une incidence sur la perception du texte ? Pourquoi d’ailleurs existerait-il autant de caractères différents, si leurs formes n’avaient aucune importance ? Nombreux sont ceux pourtant, qui pensent que la typographie ne peut avoir un rôle significatif. Il est vrai que la structure quasi immuable des lettres de l’alphabet semble laisser bien peu de possibilités d’interprétation au dessinateur de caractères.
Comment les spécificités d’une typographie aussi remarquables soient-elles, pourraient-elles être perceptible sur quelques millimètres de hauteur. Et changer l’appréciation d’un texte, alors que le lecteur n’y accorde, a priori, aucune importance ?
Ces arguments semblent irréfutables. Pourtant des études ont démontré que les lecteurs remarquent et apprécient, bel et bien, une correspondance de style entre un caractère et un texte : Un caractère leur semble mieux convenir pour une utilisation qu’un autre. Les caractères ont donc un style, soit ; mais est-il alors possible de le déterminer avec précision ? Où cela se limite-t-il à une vague impression au moment de la lecture ? Comme l’écriture manuscrites peut faire l’objet d’études graphologiques et aboutir à des conclusions claires, la typographie peut-être analysée selon des critères précis : les proportions des lettres, l’univers des formes utilisées (étroites ou larges, rondes ou anguleuses), l’épaisseur des traits (pleins et déliés), l’axe du caractère (vertical ou oblique), la largeurs des lettres (constante ou variable), ect. Ces paramètres, permettent de comprendre pourquoi un texte n’a pas le même aspect suivant les caractères utilisés. Une part subjective de la perception d’un caractère ne peut cependant être niée. Chaque lecteur le perçoit en effet au travers de filtres (culturels, émotionnels) qui lui sont personnels. Sa disposition d’esprit peut même influencer son jugement.
Pour pouvoir choisir un caractère en justifiant son choix, il est vital d’avoir à l’esprit les différents usages des polices de caractère, les styles qui les opposent et également, d’un autre point de vue, l’histoire qui les a créés.
Sur quels critères choisir un caractère ?
Tout maquettiste doit garder une loi fondamentale en tête : même si c’est un art séculaire, il ne faut pas oublier que le but premier de la typographie est avant tout fonctionnel : il s’git de rendre un message lisible. En dehors des expérimentations ou travaux proprement graphiques au parti pris délibéré, il est donc indispensable d’utiliser des polices de caractères qui correspondent au travail demandé et d’obéir aux règles typographiques en vigueur s’il s’agit de mise en page d’un texte long (article, brochure, livre…) : il faudra également bien faire attention à choisir une police dite de labeur si l’objectif est la lisibilité (en simplifiant, toute police ayant des empattements, car ces derniers rendent la lecture plus aisée sur papier). Et pour bien choisir une police , il faut déjà bien la connaitre. Choisir une typographie en se basant uniquement sur sa forme est en règle générale une grave erreur.
En dehors de toute considération fonctionnelle ou esthétique, il est important de commencer par dresser un tableau indicatif des influences émotionnelle qu’entraine l’utilisation de telle ou telle famille ou catégorie de caractères, avant de s’attarder sur chaque police isolément ; il y a en effet des caractéristiques qui sont impliquées dans des familles toutes entières, et qui se retrouvent donc naturellement dans chacun de ses membres. De la même manière, l’utilisation «forcée» (hors des normes typographique en usage) de l’italique (qui donne l’impression de parler posément, doucement), des bas de casses ou des capitales (qui suggère quelque chose dit à haute voix, avec autorité) entraîne un sous -entendu qu’il est nécessaire de connaître afin d’en faire un usage pertinent.
Le premier pas vers la reconnaissance des alphabets et le choix de leur utilisation, c’est la classification des caractères Vox Atypi élaborée en 1953 par Maximilien Vox, typographe, journaliste, maquettiste, enseignant, publicitaire, éditeur (entre autre !) et fondateur des Rencontres Internationales de Lure, Classification basée sur l’origine historique du dessin des caractères qui fut ratifiée par l’Atypi (Association typographique internationale) en 1962.
Morphologie
le rapport entre pleins et délié. C’est-à-dire les parties les plus grasses et les plus maigres de la lettre, ainsi que l’axe selon lequel ils s’organisent ont une incidence importante sur la couleur et le rythme du texte.
Empattements
L’esprit d’un texte change suivant que la typographie utilisés, a ou non, des empattements. S’il est vrai que les empattements marquent plus nettement la ligne de texte, il est hâtif de penser qu’un caractère avec empattement est plus lisible qu’un caractère bâton car beaucoup d’autres paramètres influent sur la lisibilité.
Couleur
La graisse de caractères, c’est-à-dire l’épaisseur des lettres influe sur la couleur du texte et son impact.